Bill Ackman affirme que son nouvel investissement dans Uber (NYSE : UBER) est avant tout une question de valeur, mais un gain bien plus important se profile à l’horizon

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Si vous passez beaucoup de temps sur X, vous pourriez croire que l’investisseur activiste Bill Ackman a troqué son métier de gestionnaire de fonds spéculatifs pour celui d’aspirant influenceur politique, livrant ses opinions au rythme effréné de l’actualité. Mais de temps à autre, une nouvelle thèse d’investissement perce son fil d’actualité et le géant du covoiturage Uber (NYSE : UBER) est sa dernière grande idée.

« Uber est l’une des entreprises les mieux gérées et de la plus haute qualité au monde », a écrit Ackman plus tôt ce mois-ci, révélant que Pershing Square avait commencé à acquérir des actions de la société en janvier, pour une valeur actuelle de près de 2,5 milliards de dollars. C’est un événement majeur, car la société d’investissement qu’il a fondée en 2003 est réputée pour son portefeuille extrêmement concentré, qui comptait jusqu’alors seulement neuf entreprises de premier plan, dont Nike (NYSE : NKE) et Google (NASDAQ : GOOGL).

« Fait remarquable, elle peut encore être achetée avec une décote massive par rapport à sa valeur intrinsèque », a poursuivi Ackman dans son message au sujet d’Uber. « Cette combinaison d’attributs est extrêmement rare, en particulier pour une entreprise de grande capitalisation. » Après avoir déjà bondi suite à l’annonce de son « meilleur trimestre de tous les temps » deux jours plus tôt, l’action Uber a encore grimpé de 13 % et affiche désormais une hausse de 26 % depuis le début de l’année, surpassant largement le S&P 500.

Un parcours en dents de scie

Comme la plupart des grands investisseurs activistes, Ackman affiche un bilan contrasté. Il a connu de grands succès avec Chipotle Mexican Grill (NYSE : CMG), The Wendy’s Company (NASDAQ : WEN) et la Compagnie des chemins de fer du Canada Pacifique (NYSE : CP). Mais ses échecs ont été retentissants. Il a perdu plus de 3 milliards de dollars avec Valeant Pharmaceuticals International, a connu des déconvenues avec Target (NYSE : TGT) et a dû abandonner une position vendeuse sur Herbalife après un affrontement très médiatisé avec son rival Carl Icahn. Cependant, sur le long terme, Pershing Square a surperformé le marché : depuis sa création il y a vingt ans, son rendement a grimpé de 1 670 %, contre 630 % pour le S&P 500. Cela pourrait expliquer pourquoi Ackman semble désormais privilégier l’investissement dans la valeur plutôt que l’activisme agressif qui marquait le début de sa carrière.

Pershing Square a d’ailleurs exposé la dernière évolution de sa stratégie d’investissement dans une récente lettre aux investisseurs, expliquant que la montée en puissance des fonds indiciels dans la détention de la plupart des actions a amplifié l’impact que les investisseurs « à court terme et fortement endettés » peuvent avoir sur les prix. « Les marchés boursiers ont connu une énorme volatilité sur certaines actions individuelles, même parmi les plus grandes entreprises, lorsque celles-ci publient des résultats légèrement en dessous des attentes », a écrit Ackman. C’est exactement ce qui semble être arrivé à Uber à la fin de l’année dernière, lorsque son action a chuté après des résultats trimestriels jugés décevants par certains analystes, malgré un chiffre d’affaires record.

Ackman a réaffirmé son penchant pour une approche plus long-termiste lors d’un podcast avec le YouTuber Lex Fridman l’an dernier, expliquant que L’Investisseur intelligent de Benjamin Graham, publié pour la première fois en 1949, avait inspiré sa carrière. C’est le même livre que Warren Buffett considère comme fondamental dans sa vision des marchés. « Il faut comprendre la différence entre prix et valeur », a déclaré Ackman. « Le prix, c’est ce que vous payez, la valeur, c’est ce que vous obtenez. »

Une opportunité à venir

Si Ackman affirme que son dernier investissement est motivé par la valeur, un enjeu encore plus grand pourrait se profiler : Uber possède la plateforme dominante au cœur d’une industrie sur le point d’être révolutionnée par les voitures autonomes. Waymo, filiale d’Alphabet, opère déjà des services de transport autonome dans certains marchés et Tesla (NASDAQ : TSLA) progresse également dans ses projets de taxis autonomes. Reste à savoir dans quelle mesure ces nouveaux acteurs seront enclins à collaborer avec Uber, mais son PDG Dara Khosrowshahi estime que l’entreprise est idéalement positionnée pour saisir « l’opportunité de plus de 1 000 milliards de dollars que l’autonomie débloquera aux États-Unis uniquement ». Il a intérêt à avoir raison, car le contraire pourrait anéantir le modèle économique de la société.

« Compte tenu de l’échelle de la plateforme Uber et de la capacité des chauffeurs humains à répondre dynamiquement aux pics de demande, et à faire une pause pendant les creux, collaborer avec Uber permet aux acteurs de la conduite autonome d’avancer beaucoup plus rapidement qu’ils ne le pourraient seuls », a-t-il déclaré plus tôt ce mois-ci lors d’un appel avec les investisseurs. « Ce facteur nous donne confiance dans le fait que le réseau Uber, combinant véhicules autonomes et conducteurs humains, offrira la meilleure utilisation des actifs et les meilleures opportunités de revenus pour nos partenaires. »

Alors que l’industrie évolue, la véritable surprise pour les investisseurs pourrait finalement venir d’une bonne vieille fusion-acquisition. Ce scénario a été évoqué la semaine dernière sur X dans des échanges entre Ackman, Khosrowshahi et l’investisseur Jason Calacanis, qui a lancé l’idée en premier. « Imaginez ce que le monde deviendra si TSLA, AMZN ou Google rachètent Uber pour un modeste 10 à 20 % de leur capitalisation boursière », a écrit l’animateur du populaire podcast All-In.

Ackman, de son côté, a quelques idées pour Uber, mais elles sont loin des revendications radicales qu’il portait à l’époque où il était un activiste agressif. Il propose des améliorations comme de nouvelles options de pourboires ou la possibilité de réserver plusieurs trajets, qui pourraient améliorer l’expérience utilisateur mais restent des ajustements mineurs. Le véritable enjeu, lui, se profile bien plus loin sur la route.