C’est une période exceptionnelle pour Philip Morris

Dan Weil Analyste de Nouvelles du Marché

Les valeurs « value » ont connu des années compliquées récemment, éclipsées par la surperformance des valeurs de croissance dominées par la technologie. 

Mais Philip Morris International (NYSE : PM), premier groupe mondial du tabac, fait figure d’exception à cette tendance morose. Le fait de commercialiser un produit addictif n’y est pas étranger.

De plus, l’entreprise est passée d’un modèle exclusivement centré sur la cigarette (Marlboro et Parliament étant ses principales marques) à une situation où 40 % de son chiffre d’affaires provient désormais de produits sans fumée. Cela est évidemment logique, alors que les campagnes antitabac freinent la demande de cigarettes dans le monde entier.

Les investisseurs ont réagi positivement : l’entreprise a généré un rendement total annualisé de 16,9 % sur les cinq dernières années, contre 14,7 % pour le S&P 500. Philip Morris affiche une capitalisation boursière de 246 milliards de dollars.

Ses produits sans fumée comprennent des systèmes de vapotage (marque phare VEEV), des dispositifs permettant de fumer des bâtonnets de tabac chauffé (Iqos) et des sachets de nicotine (Zyn). Ils sont disponibles sur 100 marchés à travers le monde. La quasi-totalité du chiffre d’affaires de PMI provient de l’étranger, même si Zyn est largement commercialisé aux États-Unis.

Forte croissance du chiffre d’affaires et des bénéfices

Le chiffre d’affaires tiré des produits sans fumée a bondi de 17,7 % au troisième trimestre par rapport à l’an dernier, tandis que celui des produits combustibles (cigarettes) n’a progressé que de 4,3 %. Le chiffre d’affaires total du groupe a augmenté de 9,4 % pour atteindre 10,8 milliards de dollars. Le bénéfice par action a progressé de 13 %. La marge opérationnelle ajustée est passée de 41,9 % il y a un an à 43,1 % au dernier trimestre.

PMI est numéro un en part de marché pour les bâtonnets de tabac chauffé et les sachets de nicotine. En 2024, Iqos détenait 65 % du segment du tabac chauffé, évalué à 36 milliards de dollars, lequel a crû d’environ 20 % par an au cours des cinq dernières années, selon Morningstar. Un bâtonnet de tabac chauffé génère un profit brut équivalant à 2,6 fois celui d’une cigarette.

Et si les coûts sont actuellement plus élevés pour les bâtonnets chauffés que pour les cigarettes aux niveaux de production actuels, l’analyste de Morningstar Kristoffer Inton estime qu’à terme, les bâtonnets chauffés égaleront, voire dépasseront, les marges bénéficiaires ajustées des cigarettes premium.

Concernant les sachets, les expéditions de PMI ont bondi de 36,4 % au troisième trimestre sur un an. Aux États-Unis, les volumes ont bénéficié de distributions promotionnelles gratuites, mais PMI s’attend à ce que les États-Unis restent sa région la plus rentable. L’expansion géographique a soutenu la croissance à l’international.

Du côté des cigarettes, les hausses de prix ont permis au chiffre d’affaires d’augmenter au troisième trimestre malgré une baisse de 3,2 % des volumes. PMI vise à porter la part des produits sans fumée à 67 % de son chiffre d’affaires d’ici 2030, mais Inton juge qu’un niveau de 50 % est plus réaliste.

Des fondamentaux solides

Malgré tout, l’analyste souligne la solidité des fondamentaux de PMI. « Tout d’abord, la nature même du tabac crée une fidélité de la clientèle et confère à des entreprises comme PMI un pouvoir de fixation des prix considérable », note-t-il. Comme chacun le sait, la nicotine contenue dans le tabac est addictive, ce qui incite les consommateurs à revenir, malgré les effets néfastes du tabac sur la santé. Dans la plupart des marchés, le taux de tabagisme ne recule que légèrement, précise Inton.

En outre, des études montrent que les cigarettes haut de gamme sont associées à des taux de sevrage plus faibles. Et PMI présente la plus forte concentration de cigarettes premium parmi les grands fabricants cotés, ajoute-t-il. Environ 55 % de ses expéditions dans les pays de l’OCDE concernent des cigarettes premium (principalement Marlboro et Parliament), contre 25 % pour l’ensemble du secteur.

Les consommateurs de tabac sont également fidèles aux marques, explique Inton. Une étude a montré que 87 % des fumeurs ont une marque préférée, dont 44,4 % déclarent une « forte » loyauté envers celle-ci. Par ailleurs, 83 % citent le goût comme facteur déterminant de leur choix, contre 51,7 % qui évoquent le prix. PMI pourrait donc continuer à augmenter ses prix, après des hausses annuelles à deux chiffres élevés entre 2021 et 2024.

Philip Morris fait bien plus que simplement « brasser du vent ».

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